Expo Le voyage de l'obélisque de la Concorde, musée de la Marine

Actuellement une nouvelle exposition historique ouvre ses portes au Musée de la Marine, dans le 16eme arrondissement, du 12 février au 6 juillet 2014.

Constituée de planches de dessins préparatoires et de maquettes, elle retrace le voyage de l'un des deux obélisques d'un temple égyptien de Louxor jusqu'à Paris pendant sept ans de 1828 à 1834.

Un voyage long, couteux et complexe qui révéla toutes les prouesses architecturales possibles dans la première moitié du 19eme siècle. Depuis l'expédition de Napoléon Bonaparte à la fin du 18eme siècle et même si cela se solda par une défaite, la société française à travers les arts vouait à l' Egypte un culte fasciné. En 1822, Champollion déchiffra les hiéroglyphes et participa à l'enrichissement des collections du récent musée du Louvre : le magnifique relief de Hathor face à Sethi 1er par exemple.

Puis, le vice-roi d'Egypte décida d'offrir un cadeau diplomatique à la France dans le but sous-jacent d'entretenir de bonnes relations commerciales avec l'Occident.

Il offrit les deux obélisques du temple d'Alexandrie, mais Champollion ayant joué un rôle précurseur dans l'avancée de l'archéologie égyptienne demanda ceux de Louxor qui étaient mieux conservés. Le temple de Louxor fut édifié sous Ramsès II, l'un des pharaons les plus importants de l'Histoire égyptienne, au 13eme siècle.

Les obélisques placés à l'entrée du temple, portaient les gravures des exploits du souverain et des hiéroglyphes rendant hommage aux dieux. Ces aiguilles de pierre finement ciselées servaient de liaison entre le monde terrestre et le monde céleste et divin. Il fallut mettre à terre le premier obélisque,  et contruire un bateau spécial aux mâts amovibles pour passer sous les ponts de Paris, capable de transporter un colosse de 230 tonnes. Cette entreprise gigantesque fut menée par l'architecte français Lebas qui connut de multiples péripéties : l'ennui d'attendre la baisse de la crue du Nil, les épidémies qui touchèrent les ouvriers du chantier, les avaries...

En 1834, l'obélisque arriva enfin place de la Concorde depuis Cherbourg puis Rouen. Mais il fallut encore deux ans pour construire le piedestal en granit. Le 25 octobre 1836, Lebas mena l'inauguration de cette sculpture architecturale devant plus de 200 000 personnes rassemblées. Malheureusement, Champollion acteur majeur à l'origine du projet, fut privé de voir cela de son vivant.

Cette entreprise titanesque fut un véritable succès populaire et personnel pour le roi de France Louis Philippe qui se servit de cet événement comme un outil de propagande. Le choix de la place de la Concorde voulu par le roi n'était pas le fruit du hasard, ainsi il voulut faire oublier les heures noires de la Terreur et de la guillotine, encore vives dans les mémoires.

Seulement vu l'ampleur du coût économique de ce voyage , le deuxième obélisque offert en cadeau ne fut jamais ramené d'Egypte car considéré comme trop coûteux. N'ayant jamais quitté sa terre d'origine, la France le restitua officiellement à l'Egypte en 1998.

Je vous conseille donc cette exposition pluridisciplinaire puisqu'elle se trouve à la croisée de l'Histoire, de l'architecture et du génie civil : la marine.

Elle révèle les relations diplomatiques de la première moitié du 19eme siècle, quand la France vivait une période historique sans cesse bouleversée par différents régimes politiques : l'Empire, puis le retour de la royauté et la Révolution de Juillet...

Cette exposition est importante car elle nous explique comment est arrivé un des plus beaux fleurons du patrimoine parisien. L'obélisque de la Concorde est l'un des plus beaux exemples des influences stylistiques de l'Egypte à Paris avec les sphinx de la fontaine du Châtelet ou les têtes de femmes égyptiennes sculptées vers1828, passage du Caire dans le 2eme arrondissement.

La place de la Concorde est l'une des plus belles places de Paris dans l'axe royal des Tuileries puis des Champs-Elysées.

On note la beauté de l'éclectisme stylistique entre le dessin architectural de la place sous Louis XV par Gabriel, la sculpture archéologique orientale et les deux fontaines ornées de divinités marines, conçues par l'architecte Hitorff (auteur du programme architectural et sculptural de la gare du Nord dans les années 1840).